ACCORD-CADRE DU 22 DÉCEMBRE 1998 Relatif
à la branche sur l'emploi par
l'organisation, l'aménagement, la réduction du temps de
travail
Préambule
1. Les partenaires sociaux conviennent que
l'importance du chômage dans le pays et les
conséquences qu'il engendre pour les personnes et la collectivité
sont telles qu'il faut rechercher à
tous les niveaux de la branche les moyens de contribuer à enrayer
sa progression et de concourir à sa
réduction, et par là même de renforcer le tissu social.
2. Dans cette optique, le 29 mars 1994, ils ont décidé
d'un commun accord d'engager des
négociations destinées à actualiser la convention
collective de la branche des transports publics
urbains, devenue pour partie obsolète, archaïque ou non conforme
à la réglementation du travail,
nationale ou européenne. Parmi les thèmes de négociation
retenus, l'emploi a été considéré d'emblée
comme une des priorités de la branche : pour cette raison il a
fait l'objet d'un examen systématique à
l'occasion des chapitres déjà traités qui ont donné
lieu à quatorze accords de branche depuis cette date.
Dans la logique convenue de la négociation sur l'actualisation
de la convention collective, les
partenaires sociaux ont ainsi décidé le 17 décembre
1996 d'aborder la question de l'emploi dans le
cadre de la négociation sur l'organisation, l'aménagement
et la réduction du temps de travail.
3. Les partenaires sociaux tiennent à rappeler
en préalable que le transport public est une des rares
branches d'activité où, malgré un contexte économique
défavorable, l'emploi a été maintenu et
développé de manière continue, à raison de
1 % par an en moyenne depuis 10 ans ; ils rappellent
également que les entreprises de transport public sont et resteront
des entreprises de main-d'oeuvre
et que, par conséquent, tout développement de leurs activités
est par nature favorable à la création
d'emplois.
Mais ils constatent que cette situation favorable est aujourd'hui remise
en question : un contexte
économique et social qui se traduit par un chômage important
et l'apparition de populations en
difficulté dont le transport public doit pouvoir assurer les déplacements
; une baisse de la
fréquentation de 1993 à 1996 liée notamment aux effets
conjugués d'un urbanisme au fil de l'eau, de
la concurrence de la voiture particulière qui n'a cessé
de gagner des parts de marché, et des
politiques des pouvoirs publics jusqu'à présent insuffisamment
ambitieuses du point de vue des
conditions et des moyens permettant le développement des transports
publics urbains – les résultats
de 1997, s'ils se sont stabilisés, restent néanmoins fragiles
; une évolution des modes de vie de nos
concitoyens qui tendent à optimiser leur choix de modes de déplacement
en fonction d'exigences de
plus en plus variées, dont la désynchronisation des horaires
de travail constitue un des aspects les
plus visibles.
4. Malgré ce constat et un niveau de pression
fiscale ne permettant pas de la faire progresser
davantage, les partenaires sociaux estiment que la branche doit avoir
une politique dynamique de
l'emploi en fonction de l'évolution de son marché et prenant
en compte :
– la diversité de la demande des voyageurs ;
– l'amélioration des conditions de travail des salariés
;
– le développement de la mixité, en profitant de la
création d'emplois induite par l'application du
présent accord, pour accentuer fortement l'embauche de femmes,
notamment pour le personnel
roulant, en utilisant si nécessaire des dispositifs d'adaptation
et de qualification pour pouvoir répondre
à cet objectif ;
– l'amélioration de la compétitivité des entreprises
face à la concurrence de la voiture particulière mais
aussi de la concurrence liée à l'ouverture des frontières
européennes ;
– l'amélioration de la sécurité dans les transports
urbains, notamment par une présence humaine plus
importante lorsque c'est nécessaire.
5. Pour toutes ces raisons, au regard de l'obsolescence,
l'archaïsme ou l'inadaptation des textes
réglementaires en vigueur dans la branche, notamment de l'arrêté
du 12 novembre 1942 pris en
application de la loi du 3 octobre 1940, dans l'esprit et la lettre de
l'accord national interprofessionnel
du 31 octobre 1995 et dans le cadre des dispositions législatives
ou réglementaires en vigueur ou à
venir, notamment de la loi du 13 juin 1998 d'orientation et d'incitation
relative à la réduction du temps
de travail, apportant des compensations financières significatives
aux entreprises en contrepartie
d'une réduction de la durée du travail, les partenaires
sociaux reconnaissent la nécessité de conclure
un accord portant sur l'ensemble des éléments constitutifs
de l'organisation, l'aménagement et la
durée du travail afin de développer l'emploi dans la branche
:
– la réduction de la durée du travail dans la branche
et dans les entreprises permet en priorité la
création d'emplois à durée indéterminée
: par un autofinancement de la branche et des entreprises lié
à des gains de productivité interne résultant notamment
des révisions de l'organisation du travail ; par
l'issue des négociations salariales nationales ou locales ; par
des gains de productivité externe ; le cas
échéant, par les compensations financières aux entreprises
en application des dispositifs législatifs et
réglementaires en vigueur ou à venir ;
– la répartition de la durée du travail qui permet
une meilleure adaptation du service public à la
demande des voyageurs, notamment par la mise en place de différents
modes d'organisation et
d'aménagement du temps de travail ;
– la limitation du recours aux heures supplémentaires, aux
contrats à durée déterminée, au travail
temporaire ou au temps partiel contraint ;
– le temps partiel : en mettant tout en oeuvre pour que le temps
partiel soit un vrai emploi bénéficiant
des mêmes droits pour tous les éléments de la rémunération
et de statut non liés à la durée de
présence au travail ;
– la mise en place d'un compte épargne-temps permettant aux
salariés de prendre un ou plusieurs
congés de longue durée rémunérés au
cours de leur vie professionnelle, libérant ainsi du temps de
travail au profit de demandeurs d'emplois ;
– le personnel cadres et assimilés : afin qu'ils puissent
bénéficier de la réduction du temps de travail et
des autres dispositions de l'accord, en tenant compte de la diversité
et de la spécificité des fonctions
exercées ;
– la généralisation et l'élargissement au niveau
de la branche, pour les salariés qui en font la
demande, des dispositifs de cessation anticipée d'activité
fixés par l'Etat ou les accords
interprofessionnels sous réserve de leur maintien et sans qu'ils
soient limités ;
– la mise en place au niveau national d'un observatoire paritaire
sur l'aménagement, l'organisation et
la durée du travail dans la branche.
TITRE Ier CRÉATION D'EMPLOIS PAR LA RÉVISION
DE L'ORGANISATION,
L'AMÉNAGEMENT DU TRAVAIL, LA RÉDUCTION DE LA DURÉE
DU TRAVAIL
Chapitre Ier Durée du travail
Les parties signataires entendent inscrire dans le présent
accord de branche leur volonté d'aboutir à la
création d'emplois à durée indéterminée
par la réduction significative de la durée du travail sans
que
cette mesure ait des conséquences directes sur le prix payé
par le voyageur utilisant le service public
de transport.
Pour ce faire, l'accord doit s'inscrire à la fois :
– dans le cadre des dispositifs législatifs et réglementaires
en vigueur ou à venir apportant, le cas
échéant, des compensations financières suffisantes
aux entreprises en contrepartie d'une réduction
de la durée du travail et de création ou maintien des emplois
;
– dans le cadre d'un autofinancement des entreprises par la révision
des modes d'organisation du
travail, permettant une meilleure productivité interne, en application
des chapitres II et III et du titre Ier
du présent accord, par des gains de productivité externe
chaque fois que cela est possible, et par la
détermination des modalités de rémunération
résultant des négociations d'entreprise.
Article 1er Réduction de la durée du travail
Les dispositions suivantes annulent et remplacent l'article
27 de la convention collective nationale des
réseaux de transports publics urbains de voyageurs :
La durée hebdomadaire conventionnelle du travail est fixée
à 35 heures en moyenne, sur la période
définie aux articles 3 ou 4 du présent accord.
Article 2 Négociation d'entreprises
Dans un délai de 6 mois à compter de la date d'application
du présent accord, les entreprises de la
branche dont la durée du travail excède la nouvelle durée
du travail conventionnelle prévue à
l'article 1er ci-dessus et qui n'ont pas déjà conclu un
accord en ce sens devront ouvrir des négociations
avec leurs partenaires sociaux dans le cadre des dispositions prévues
aux chapitres II et III du titre Ier
du présent accord.
Les entreprises dont la durée du travail est égale ou inférieure
à la durée prévue à l'article 1er du
présent accord pourront ouvrir des négociations dans le
cadre des dispositions de la loi du 13 juin
1998 n° 98-461 d'orientation et d'incitation relative à la
réduction du temps de travail.
Chapitre II Organisation et aménagement du travail
Les dispositions suivantes annulent et remplacent l'article 28 de la convention
collective nationale des
réseaux de transports publics urbains de voyageurs :
SECTION 1 ORGANISATION DU TRAVAIL
L'organisation du travail mise en place par le chef d'entreprise ou
d'établissement doit permettre de
répartir équitablement les contraintes de travail entre
les salariés.
Article 3 Organisation du travail en l'absence d'accord d'entreprise
3.1. Cycles d'organisation du travail :
Les cycles d'organisation du travail visés dans le présent
article correspondent aux différents niveaux
d'activité de l'entreprise (périodes scolaires, vacances,
etc.). En conséquence, la répartition de la
durée du travail à l'intérieur d'un cycle ne se répète
pas à l'identique d'un cycle à l'autre, cela par
dérogation aux dispositions du code du travail.
La durée d'un cycle d'organisation du travail ne saurait excéder
12 semaines.
3.2. Calcul de la durée du travail :
La durée moyenne du travail prévue à l'article
1er du présent accord est calculée conformément aux
dispositions du code du travail et, en tout état de cause, sur
un maximum de 12 semaines
préalablement déterminées.
3.3. Procédure de mise en place des cycles d'organisation
du travail :
Lorsque le chef d'entreprise ou d'établissement décide
de mettre en place un dispositif d'organisation
du travail selon les termes des articles 3-1 et 3-2 du présent
accord, il devra respecter la procédure
suivante :
– la mise en place de l'organisation du travail, au sein d'une entreprise
ou d'un établissement, doit
avoir fait l'objet d'une consultation préalable du comité
d'entreprise ou d'établissement, dénommé ciaprès
CE ou, à défaut, des délégués du personnel
;
– l'avis du CE doit être adressé, dans un délai
de 15 jours, à l'inspecteur du travail. « Lorsqu'il n'existe
pas de CE ou de délégués du personnel, l'information
préalable de mise en place doit être faite
auprès de l'inspecteur du travail ; »
– le chef d'entreprise ou d'établissement doit communiquer
le nouveau programme d'organisation du
travail au CHSCT lorsque celui-ci existe.
3.4. Délai de prévenance :
En cas de changement d'horaires collectifs significatifs affectant
l'ensemble d'une catégorie de
personnel, l'organisation mise en place selon les dispositions de l'article
3-1 du présent accord pourra
être révisée, notamment en fonction des changements
intervenant dans la demande de déplacement
ou des modifications des contraintes de l'entreprise. L'employeur devra
alors faire connaître à l'avance
le dispositif mis en place à l'intérieur d'un cycle d'organisation
du travail ainsi que la durée et le
nombre desdits cycles, en respectant, sauf cas d'urgence, un délai
de prévenance de 7 jours, et la
procédure prévue à l'article 3-3 du présent
accord.
3.5. Lissage du salaire :
De façon à assurer aux salariés un salaire
régulier et stable, le dispositif mis en place n'aura aucune
incidence en plus ou en moins sur le salaire mensuel convenu appelé
« salaire lissé », conformément
à l'article L. 212-8-5 du code du travail.
Article 4 Organisation du travail dans le cadre des accords
d'entreprise
4.1. Principes :
Les entreprises de transport urbain peuvent, dans le cadre de
l'article 1er du présent accord et des
dispositions du code du travail, mettre en place par accord d'entreprise
des modalités d'organisation et
d'aménagement du travail librement négociées au niveau
local entre les partenaires sociaux, tenant
compte des contraintes de service public et des spécificités
de chaque entreprise.
L'organisation du travail mise en place par les accords d'entreprise se
fonde notamment sur les
articles L. 212-1, L. 212-2, L. 212-2-1, L. 212-5, L. 212-8 et suivants
du code du travail, sous réserve
de respecter les dispositions législatives et réglementaires
en vigueur, sauf dérogations prévues au
présent accord.
Les accords d'entreprise en vigueur, non contraires aux dispositions du
présent accord, sont validés.
Le présent accord ne peut avoir pour effet de remettre en cause
les accords d'entreprise plus
favorables.
4.2. Lissage du salaire :
De façon à assurer aux salariés un salaire
régulier et stable, le dispositif mis en place n'aura aucune
incidence en plus ou en moins sur le salaire mensuel convenu appelé
« salaire lissé », conformément
à l'article L. 212-8-5 du code du travail. |